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Après un billet un peu sombre sur ma contre-utopie préférée, un retour vers la couleur s’impose! L’exposition consacrée à Gino Severini (1883-1966) au musée de l’Orangerie est une ode à la couleur et à l’art du début du XXième siècle.
Car monsieur Severini a fait un peu de tout: du cubisme, du pointillisme, du divisionisme, du futurisme, du néo-classicisme, et surement quelques autres mouvements artistiques de l’époque. Au moins, on ne s’ennuie pas à cette exposition!
La sélection d’œuvres est très intéressante, elles sont toutes plus belles les unes que les autres, mais le commissaire a été nettement moins doué pour les titres des tableaux: entre les fautes d’italien et les titres du type « Expansion sphérique de la lumière centripède et centrifuge. Simultanéisme » (centripède? la lumière a les pieds en dedans? Décidément, dans le milieu de l’histoire de l’art, à défaut d’avoir une quelconque culture scientifique, ils pourraient au moins faire l’effort d’ouvrir un dictionnaire et de trouver le mot centripète), on a un peu l’impression d’une scénographie bâclée. C’est dommage.
Les danseuses divisionistes de Severini font penser à des femmes en mouvement qui se regarderaient dans un miroir brisé. On est loin des danseuses de Degas. Ici tout bouge. Comme un mécanisme un peu fou.
Ses tableaux pointillistes, qui rappellent un peu Signac, ne sont pas particulièrement accrocheurs.
En revanche, son avancée vers de plus en plus d’abstraction offre au spectateur un feu d’artifice de couleurs et des titres sous forme d’équations farfelues de type danseuse=mer ou danseuse+mer=bouquet de fleurs
Au début de la première guerre mondiale, il réalise un certain nombre de tableaux ayant pour thème la guerre. Il s’agit avant tout d’exprimer « l’idée » de la guerre, et pas d’en fait un rendu réaliste. Les mots écrits envahissent la toile, et prolongent les armes et leurs projectiles dans le très célèbre tableau « canons en action » (vous avez dû le croiser dans vos livres d’histoire).
Notez que le tableau est en français. Pourtant Gino Severini est italien (comme son nom le suggère) mais il a beaucoup vécu à Paris où il déclare « être né intellectuellement et spirituellement ».
Après cette période futuriste, il a un période cubiste. Severini a choisi un cubisme coloré et parfois ludique. Son portrait de Paul Fort (écrivain et beau-père de l’artiste), avec la moustache en poils collée sur le tableau m’a semblé une idée vraiment enthousiasmante.
Mais après s’être bien amusé, Gino s’est assagi. Il a fait un grand virage vers le classicisme. Adieu couleurs flamboyantes, abstraction orphique à le Delaunay et autres caractéristiques jubilatoires de sa peinture. Les valeurs souveraines (la femme au foyer qui pond des marmots?) sont revenues en force.
Les grands portraits famille des années trente ne font pas rêver. En tout cas pas sur le bonheur des Severini. Même si je préfère la touche du peintre dans ces peintures moins lisses que celles de la période néo-classique, on sent que la jeunesse, l’énergie, la couleur, l’espoir, le mouvement, tout est derrière lui. C’est un brin lugubre comme note de fin.
Notez tout de même la présence du pigeon (ROU-ROU) chéri de l’artiste dans le portrait de famille 🙂